Fini l’apprentissage qui dissocie notes, doigts, puis qualité de son et musicalité. Le culte du juste son dès le départ du travail d’une oeuvre, avec les gestes solides et répertoriés qui conviennent, façonne une mémoire corporelle juste qui permettra ensuite, dans la vitesse d’exécution, une précision et une beauté du son qui seront conservées.
DES SONS DIVERS POUR LA MÊME NOTE. Le son du piano ne provient pas seulement du seul choc du marteau contre les cordes. Des bruits de mécanique (au niveau du clavier essentiellement) entrent dans la composition du son, qui seront plus ou moins atténués selon la vitesse d’attaque du doigt sur la touche (qui supprime alors plus ou moins le bruit du bois). La pédale elle aussi amplifie ces caractéristiques.
De plus les doigts ont chacun une forme différente et, de par leur position sur la main, génèrent naturellement un son différent. Si la virtuosité développée apprend à gommer ces différences pour obtenir un jeu égal et perlé par exemple, chaque doigt va être utilisé par ailleurs pour donner tel ou tel type de son par lui-même ou aussi comme support d’une masse moins mobile (avant-bras, bras, buste).
POIDS DU CORPS (TOUT OU PARTIE). C’est là qu’intervient le poids, soit de la main, de l’avant-bras, du bras entier, voire du buste, ou même du corps depuis les pieds. Ce poids, choisi en fonction de l’intensité, de l’effet ou du phrasé voulus, engage tout ou partie du corps.
Ainsi, on pourra varier très facilement les nuances, en changeant le poids exercé sur la main et les doigts, en engageant plus ou moins le buste et en le redressant plus ou moins. De même, dans une même nuance, on obtiendra des fortissimi différents selon qu’on souhaite obtenir des effets de percussion, de plénitude, de legato, en sollicitant le seul avant-bras (plus mobile donc plus percutant) ou le bras entier (plus inerte et plus lourd).
ARTICULATIONS « FIXEES ». La transmission de poids et sa variation demandent que l’on sache « fixer » les articulations ou telle ou telle partie du membre. Une articulation cassée ou détendue ne transmettra pas le poids des parties supérieures du membre. Une articulation fixée pourra permettre que le poids des parties supérieurs toujours plus lourdes s’appuie sur elle et soit transmis aux extrémités. D’où la nécessité d’avoir toujours des doigts et une main fixés. Ensuite, selon la nuance et le phrasé souhaités, on fixera ou pas le poignet, le coude, voire l’épaule…
Ainsi, une multitude de qualités sonores et types d’attaques sont à la portée du pianiste, correspondant chacun à un geste répertorié et maîtrisé.
Le corps restitue les gestes dont on l’a éduqué. Il est un moment où, dans la vitesse d’exécution, c’est le corps qui prend le dessus sur le contrôle mental. La justesse d’exécution est donc basée sur la mémoire corporelle.
D’où la nécessité d’engranger dès le départ des gestes justes qui génèrent le juste son. Plus besoin d’avoir à casser ou à rattraper ensuite les écueils d’une technique qui aurait été faussée ou négligée dès le départ. La mémoire corporelle permet aussi de libérer l’attention pour mieux accompagner et diriger le phrasé et son impact.
La détente musculaire est primordiale. Elle permet de jouer avec souplesse, de conditionner positivement le corps contre le trac. Elle évite raideurs qui peuvent être sources de fausses notes, de faux accents, de tempo ralenti et de tendinites!
Elle se travaille consciemment, lentement, avec des mouvements alternatifs qui permettent le relâchement des muscles antagonistes, malgré des articulations fixées. Le travail en arrêt sur des notes permet de détendre les muscles jusqu’à leur repos total. Dans la vitesse, le corps conserve ensuite la mémoire de cette détente; la virtuosité en est facilitée et s’exécute sans douleurs.
En ajoutant une respiration ample qui accompagne le geste et le phrasé musical dans le travail lent, non seulement on oxygène le corps, mais on contrôle mieux la détente musculaire, tout en étant en phase avec la musique. Dans la vitesse, cette qualité de respiration constituera le conditionnement facilitant la détente et la fluidité.
Le travail dès le départ d’un geste juste et d’un son juste, relayés aisément plus tard par la mémoire corporelle, induit une optimisation maximale du temps de travail et des efforts fournis, quel que soit l’élève. Ainsi, quel que soit le niveau et la démarche de l’élève (amateur ou ambition professionnelle), Orchia d’Orio livrera les mêmes fondamentaux, la même qualité de transmission, le même engagement.
Car, par la sollicitation consciente à la fois physique, intellectuelle, émotionnelle que requiert la technique russe de piano, l’élève, amateur ou averti, développera des qualités de conscience et d ‘attention bénéfiques au-delà du seul domaine de la musique. L’éthique de cette transmission repose sur l’EXCELLENCE POUR TOUS.
La position idéale du pianiste et l’enchaînement des gestes ne peut se faire sans respecter l’anatomie et sa logique. Tensions ligamentaires, passages en force, raideurs sont évités dès le départ. Les explications sont données avant tout par l’anatomie et la morphologie. Quelques notions sont abordées, qui éviteront les dérives possibles qu’engendre parfois une approche empirique qui ne donne pas à décoder le mécanisme du corps.
Voir article correspondant: SUBTILITE DE LA PEDALE.
Voir article correspondant : TECHNIQUES ANTI-TRAC.
Le travail « à la table » est préalable : il permet de repérer les positions, phrasés, respirations et plans sonores, le genre de gestes requis, de doigter en conséquence la partition, de repérer la précision de la pédale. Un travail d’annotation s’impose bien souvent.
Ce processus renforce aussi la solidité de la mémoire et une vision synthétique de l’oeuvre, vision que l’on peut perdre parfois ensuite dans l’étude, généralement longue, des détails.
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